Gabrielle Wittkop 1920–2002

Gabrielle Wittkop 1920–2002

26 mars 2020 20 Par Félicie Dubois

Gabrielle Wittkop

1920–2002

 

Née le 27 mai 1920, à Nantes, Gabrielle Wit­tkop est morte à Franc­fort-sur-le-Main le 22 décem­bre 2002, jour du sol­stice d’hiver. Elle aurait eu cent ans cette année.

Sous un fameux vers de Baude­laire — O mort, vieux cap­i­taine, il est temps! lev­ons l’ancre! — le faire-part de décès annonçait : Gabrielle Wit­tkop-Ménardeau… rend pub­lic qu’elle a quit­té la vie. La mer a accueil­li ses cen­dres.

J’ai longtemps cru qu’elle s’était sui­cidée : « La vieille dame excen­trique qui écriv­it Le Nécrophile a mis fin à ses jours en homme libre » titrait Libéra­tion, mar­di 24 décem­bre 2002. Niko­la Delescluse, ayant droit lit­téraire de Gabrielle Wit­tkop, pré­cis­era plus tard que son amie n’a pas eu le temps de « mourir de sa main », comme elle le souhaitait ; la Camarde l’a devancée.

Les élé­ments biographiques con­cer­nant Gabrielle Wit­tkop sont très minces. Cer­taines infor­ma­tions cir­cu­lent qu’on ne saurait véri­fi­er (Gabrielle détesterait que l’on fouille), d’autres ont été racon­tées par la pre­mière con­cernée, qui con­tait à mer­veille. Le mag­nifique jour­nal imag­i­naire tenu par Hippolyte/Wittkop dans Chaque jour est un arbre qui tombe[1] en témoigne de façon remar­quable… si tant est que les signes soient eux-mêmes ani­més du désir d’être lu.[2]

 

Alfred Kubin, “Die Stunde Der Geburt” (“L’heure de la nais­sance”, 1903)

 

Gabrielle Ménardeau est née à Nantes en 1920. Orphe­line de mère très tôt, élevée par un père libre-penseur qui lui ouvre sa bib­lio­thèque, elle com­mence à écrire sous l’égide de son unique maître : Dona­tien Alphonse François, mar­quis de Sade. Sade influ­ence ma pen­sée et tout ce que j’écris, parce qu’il est pour moi le mod­èle et le parangon de toute lib­erté d’esprit. (…) Sa pen­sée est tou­jours autonome, vitale, dynamique et claire (…) il est le seul styl­iste véri­ta­ble d’un siè­cle qui fut surtout un siè­cle de penseurs, dira-t-elle.[3]

Pen­dant la Sec­onde Guerre mon­di­ale, Gabrielle cache un déser­teur de l’armée alle­mande[4], Jus­tus Frantz Wit­tkop, essay­iste homo­sex­uel de vingt-deux ans son aîné, qu’elle épousera en 1946, à Bad Hom­burg (le « Roulet­ten­burg » du Joueur de Dos­toïevs­ki). Ils vivront un mariage d’affection pen­dant quar­ante ans. Atteint de la mal­adie de Parkin­son, Jus­tus s’est ôté la vie en 1986 ; Gabrielle Wit­tkop évoque l’épilogue dans Hem­lock.[5]

 

L’enfant des Lumières n’était pas casanière. Jour­nal­iste indépen­dante pour la Frank­furter All­ge­meine Zeitung, Gabrielle Wit­tkop voy­agea en Inde et en Asie du Sud-Est (Suma­tra, Java, Bornéo).

 

L’auteur du Nécrophile[6], La Mort de C.[7], Sérénis­sime assas­si­nat[8]… nous revient avec un roman inédit — Les Héritages — aux édi­tions Chris­t­ian Bour­go­is. Le coro­n­avirus ver­sion 2020 ayant boulever­sé le pro­gramme, il fau­dra patien­ter pour se pro­cur­er l’ouvrage (Cf. Cen­te­naire de Gabrielle Wit­tkop).

 

Gabrielle Wit­tkop, “Les héritages” (Bour­go­is, 2020)

 

J’ai ren­con­tré Gabrielle Wit­tkop il y a vingt ans, en févri­er 2001, à l’occasion de deux réédi­tions et d’une paru­tion (les trois chez Ver­ti­cales, dirigées à l’époque par Bernard Wal­let[9]) : Le Nécrophile, accom­pa­g­né de six col­lages orig­in­aux ; La Mort de C., suivi du Puri­tain pas­sion­né; Sérénis­sime assas­si­nat, roman véni­tien inédit.

J’écrivais alors dans la revue Lunes (un trimestriel sous-titré « Réal­ités, Par­cours, Représen­ta­tions de Femmes ») des arti­cles, por­traits ou inter­views, con­sacrés à ces auteurs que l’on n’appelait pas encore des « autri­ces » ; après Jane Bowles et avant Elfriede Jelinek, le sujet s’imposait.

Com­ment par­ler de Gabrielle Wit­tkop aujourd’hui ?

Cette soliste, à la voix aus­si élé­gante que ténébreuse, son­nait déjà douloureuse­ment aux oreilles de cer­taines il y a près de vingt ans, en jan­vi­er 2001. Après vous avoir écouté, je sais pourquoi vous me faites peur, avait fini par lâch­er Françoise Giroud sur le plateau de Bernard Pivot :

 

« Après vous avoir lu, j’aimerais com­pren­dre pourquoi vous m’avez boulever­sée », ai-je pen­sé de mon côté.

Ren­dez-vous est pris à Paris Mont­par­nasse, Hôtel Lenox, rue Delambre.

J’arrive en avance, Gabrielle Wit­tkop est ponctuelle. Elle me rejoint dans le hall de l’hôtel — presque aveu­gle, souri­ante et déjà bavarde —, pro­pose de s’installer au bar. Un laveur de car­reaux emporte ses éponges, Madame Char­lotte prend notre com­mande. « Que buvez-vous ? » me demande Gabrielle ; « La même chose que vous » dis-je, d’excellente humeur.

Un auteur sans « e » qui dénonce d’un feule­ment poli, à l’instar d’Annie Le Brun, toute ten­dance à la fem­mel­li­tude, et clame, la mine réjouie : Je suis un homme heureuxme fait face.

 

Gabrielle Wit­tkop, “Le nécrophile” (Ver­ti­cales, 2001)

 

En 2001, l’année de la troisième édi­tion chez Ver­ti­cales du pre­mier roman de Gabrielle Wit­tkop, la meilleure des trois sans con­teste, on pou­vait lire dans le dossier de presse, sous la plume de l’auteur lui-même : Les per­son­nes qui pour­raient être choquées par ce texte n’auraient alors pas saisi que la mort est indis­so­cia­ble de la vie et que refuser obstiné­ment l’idée de celle-là, c’est ne pas savoir tra­vers­er heureuse­ment celle-ci. 

 

Février 2001, Paris

GW : Le Nécrophile est un texte impor­tant dans l’ensemble de mon tra­vail. Je l’ai écrit comme sous une poussée intérieure, comme sous la dic­tée… Je l’ai écrit très vite, en un mois à peine, il y a déjà fort longtemps. Il a paru pour la pre­mière fois chez Régine Deforges, en 1972. Il fal­lait beau­coup de courage, à cette époque, et elle avait ce courage. Je n’ai pas voulu provo­quer — je ne le veux jamais — j’ai voulu faire quelque chose de nou­veau. J’ai offert ce livre à Christo­pher, C. Je voulais lui faire un cadeau, car cet homme a été, en quelque sorte, le catal­y­seur de mon tra­vail lit­téraire. Avant, j’avais écrit des nou­velles qui n’étaient pas bonnes et je me con­sacrais à des études d’Histoire culturelle.

FD : Vous avez écrit un ouvrage sur l’Histoire des modes européennes[10], notam­ment…

GW : C’est cela, oui, en alle­mand. Et sur Hoff­mann, E.T.A. Hoff­mann[11]. Je pré­cise tou­jours E.T.A., car des Hoff­mann, il y en a trois pages dans l’annuaire téléphonique.

FD : L’auteur de Sœur Moni­ka.

GW : C’est ce que je pense moi aus­si, mais cer­tains attribuent ce texte à d’autres.

FD : Dans son jour­nal, le nécrophile se sou­vient de sa décou­verte du plaisir sex­uel, l’année de ses huit ans. Seul dans sa cham­bre, l’enfant s’ennuie. Pour se dis­traire, il joue avec cette chose chaude et douce qui, à son grand éton­nement, réag­it à ses caress­es avec une volup­té incon­nue jusqu’alors. Soudain, sa grand-mère l’interrompt pour lui annon­cer la mort de sa mère : Grand-mère san­glotait. Embrasse ta maman encore une fois, me dit-elle en me pous­sant vers le lit. Je me haus­sai vers cette femme mer­veilleuse allongée par­mi la blancheur du linge. Je posai mes lèvres sur son vis­age de cire, je ser­rai ses épaules dans mes petits bras, je res­pi­rai son odeur enivrante. C’était celle des bom­byx que le pro­fesseur d’histoire naturelle nous avait dis­tribués à l’école et que j’élevais dans une boîte de car­ton. Cette odeur fine, sèche, musquée, de feuilles, de larves et de pier­res, sor­tait des lèvres de maman, elle était déjà répan­due dans sa chevelure comme un par­fum. Et soudain, la volup­té inter­rompue res­saisit ma chair enfan­tine avec une brusquerie décon­cer­tante. Pressé con­tre la hanche de maman, je me sen­tis par­cou­ru d’une com­mo­tion déli­cieuse, tan­dis que je m’épanchais pour la pre­mière fois. 

Point n’est besoin d’être ver­sé dans la psy­ch­analyse pour sug­gér­er que cet événe­ment trau­ma­ti­sant est à l’origine de la patholo­gie future de votre héros…

GW : J’ai com­mis une grande faute sur le plan médi­cal. J’ai écrit qu’il s’épan­chait pour la pre­mière fois. Or, s’il peut avoir une érec­tion, il n’y a pas d’éjaculation à cet âge. Il faut une cer­taine matu­rité des glandes.

FD : L’épisode lit­téraire est-il, en par­tie, auto­bi­ographique ?[12]

GW : Non, absol­u­ment pas. En revanche, j’ai tou­jours été fascinée par la mort. J’ai eu le priv­ilège d’avoir une enfance soli­taire et lorsque, au cours de mes prom­e­nades, je tombais sur un squelette d’oiseau ou un cadavre de chat, je me demandais tou­jours « qu’est-ce que la mort ? » Nous ne savons pas ce qu’est la mort, nous savons ce qu’elle n’est pas.

FD : Votre enfance sem­ble faire écho à celle de Mar­guerite Yource­nar : une mère mal aimante et absente (Ma mère sem­blait effacée comme à la gomme et sa présence même lais­sait un vide, écrivez-vous dans Le Puri­tain pas­sion­né)[13], un père libre-penseur qui vous ini­tie à la lecture…

GW (avec une morgue rieuse) : Je n’étais pas une enfant, j’étais un petit monstre.

FD : L’élégance vir­ile de votre style et une misog­y­nie non dis­simulée vous rap­prochent de l’académicienne tan­dis que son sens du sacré, sa per­pétuelle quête spir­ituelle, sem­ble vous en éloigner.

GW : Pour moi, la ques­tion est réglée. On peut dire que c’est sim­pliste de ma part, mais il s’agit de se sen­tir bien, n’est-ce pas ? D’être bien dans sa peau. Or, puisque le sys­tème des philosophes matéri­al­istes du XVIIIe siè­cle me con­vient, pourquoi chercher ailleurs ?

FD : N’avez-vous jamais cru en Dieu ?

GW : Mon père m’a racon­té l’anecdote suiv­ante : « Une fois, je t’ai sur­prise en tes dévo­tions. Tu étais astrolâtre. Tu ado­rais la lune, tu te proster­nais sur la ter­rasse en faisant Oh! Oh! Je me suis dit, elle en est à sa phase paléon­tologique et, de peur que tu te refroidiss­es, j’ai mis une cou­ver­ture sur toi sans te trou­bler dans tes dévotions. »

FD : Vous écrivez, dans Le Nécrophile : Il y a pureté chaque fois qu’un nou­veau seuil est franchi. Idée que vous reprenez dans La mort de C. : Franchir un seuil est un acte de pureté. Pou­vez-vous développer ?

GW : Je crois per­son­nelle­ment que… je pense — je ne crois rien — que, quand nous mourons, la con­science indi­vidu­elle est totale­ment abolie du fait de la destruc­tion du cerveau. Le cerveau… c’est le plus grand mys­tère qui ait jamais existé. Com­ment le con­cret peut-il don­ner nais­sance à l’abstrait ? Com­ment une pen­sée peut-elle être générée par une masse de chair ? Les cen­dres jetées à la mer, comme à la fin de La mort de C., peu­vent devenir une belle per­le… Oui, il y a un seuil. Les Égyp­tiens com­para­ient la mort à une porte… Exi­tus letal­is

FD :… « l’issue fatale »…

GW : oui, l’acte du « mourir »…

FD : Pensez-vous que l’on puisse, de son vivant, franchir des seuils, muter en pro­fondeur, où bien la mort est-elle l’unique transformation ?

GW : Il peut cer­taine­ment se pro­duire, sur le plan psy­chique, des change­ments pro­fonds dans un être. Un phénomène qui ne me con­cerne pas, mais qui existe, est l’apparition soudaine de la foi qui vient, comme chez Paulus, ou qui dis­paraît comme chez James Joyce. Avez-vous lu Por­trait de l’artiste en jeune homme ? Sou­venez-vous… quand il voit cette jolie fille sur la grève… elle est là, comme un grand oiseau avec ses jupes troussées… la beauté du monde… Et il perd la foi. Joyce, c’est un des plus grands. Avec Proust. Et plus tard, Genet.

 

Francesco Guar­di, “Canal Grande con San­ta Lucia e San­ta Maria di Nazareth” (1775)

 

FD : Com­ment voulez-vous mourir ?

GW : Je ne voudrais pas être assas­s­inée ni écrasée par un chauffard.

FD : Tel Denis, à la fin du Puri­tain pas­sion­né

GW : Oui, quelle ironie ! Je ne sais pas si je mour­rais de ma pro­pre main, si c’est néces­saire… J’aimerais bien mourir dans mon lit, dans mes draps.

FD : Vous écrivez, dans La Mort de C. : Toute éven­tu­al­ité étant inces­sam­ment renou­ve­lable selon le principe de la mul­ti­pli­ca­tion géométrique, chaque événe­ment est vari­able à l’infini. Les com­bi­naisons, adap­ta­tions et ajuste­ments nais­sent les uns des autres comme les palmes des palmes, les feux d’artifice cel­lu­laires, les explo­sions de galax­ies incon­nues et qui peut-être sont : l’Éternité.[14]

Si je qual­i­fie votre œuvre en général, et La Mort de C. en par­ti­c­uli­er, de « quan­tique », de lit­téra­ture à l’esthétique quan­tique, que me répondez-vous ?

GW : Kan­tique, de Kant ?

FD : Non, de quan­ta. La théorie quan­tique est une révo­lu­tion sci­en­tifique, apparue au début du vingtième siè­cle en physique et en astro­physique, qui a brisé l’édifice échafaudé par la sci­ence clas­sique en osant envis­ager, de façon a‑rationnel, le prob­lème de l’existence de l’esprit et de la matière.

GW : Je suis peu qual­i­fiée pour vous répon­dre, car, en ce qui con­cerne la physique, je suis presque aus­si igno­rante qu’en ce qui con­cerne la mécanique.

FD : Eh bien, fig­urez-vous que vous for­mulez, lit­téraire­ment, cer­tains principes de la théorie quantique.

GW (avec cette morgue rieuse qu’elle affec­tionne tant) : Le fait d’avoir mené une vie si soli­taire a fait de moi un génie. Un génie, c’est un mon­stre, et le mon­stre, il n’est pas sociable…

FD : Vous êtes comme un tigre soli­taire errant dans une forêt marécageuse…

GW : Je suis une bête soli­taire et, de même que le tigre doit se débrouiller dans les forêts marécageuses, l’homme soli­taire doit se débrouiller dans la jun­gle des idées. Et c’est bon, ça !

FD : Êtes-vous rassasiée ?

GW : Mentalement ?

FD : Oui.

GW : Fatiguée, sou­vent. Il m’arrive d’être fatiguée men­tale­ment. Alors là, j’ai une grande puis­sance de som­meil. Et c’est ce qui m’a tenue, jusqu’à présent, à peu près all right. Je dors énor­mé­ment. C’est une régénéres­cence, à chaque fois. Le matin, je suis fraîche comme la rose.

FD : Vous tra­vaillez le matin ?

GW : Ah non ! L’après-midi. Le matin est con­sacré aux tâch­es triv­iales pour lesquelles j’ai besoin de beau­coup d’énergie. Mais il faut le faire… j’aime la pro­preté, j’aime l’ordre. Et puis il y a la banque, la poste, les médecins… J’ai la chance d’avoir un apparte­ment silen­cieux qui s’ouvre sur un frag­ment de l’ancien parc des Roth­schild. Je n’entends que ma pro­pre res­pi­ra­tion. Je tra­vaille jusqu’à sept heures moins dix, alors, comme un fonc­tion­naire, je plie bagage et je com­mence à lire jusqu’à minu­it. J’ai un rythme monacal. Quand je ne lis pas, la soirée est con­sacrée aux amis. J’ai un culte de l’amitié extrême­ment fort. J’ai des ami­tiés de plus de vingt-cinq ans… nous nous vou­voyons toujours.

FD : Des amis alle­mands ou français ?

GW : Alle­mands, essen­tielle­ment. Mais depuis décem­bre, depuis que l’on me con­naît un peu en France, des gens très sym­pa­thiques s’approchent de moi… Je vous en prie, Felicita…

 

Madame Char­lotte dépose deux ver­res de vin blanc devant nous.

 

FD : En évo­quant les pro­pos de C., vous rap­portez cette phrase : Ceux-là seuls sont morts qui n’ont rien lais­sé. Par­lez-moi de la trace… com­ment laiss­er une trace de soi quand on revendique, comme vous le faites con­stam­ment, sa haine de la génération ?

GW : Seule la trace intel­lectuelle compte.

FD : Vous écrivez égale­ment : La vie de C. n’a pas d’autre sens que celui qu’elle acquiert par la mort, dans la mort. Pensez-vous que votre exis­tence n’aura pas d’autre sens que celui qu’elle acquer­ra par la mort, dans la mort ?

GW : Oui, c’est la sum­ma. Faire le point. J’aimerais bien avoir quelques min­utes avant de mourir pour faire la sum­ma. Mais j’ai déjà com­mencé à établir la somme algébrique des acquis et des manques.

FD : La Mort de C. est un texte mag­nifique, celui que vous préférez, je crois…

GW : Il me va sous la peau. J’ai fait une lec­ture, il y a dix jours, à Franc­fort… j’avais une boule dans la gorge et les larmes aux yeux.

FD : Ce texte nous laisse dans un état de pléni­tude proche de l’anéantissement. L’âme reste sus­pendue où vous avez voulu la laisser…

GW : C’est un sus­pens, au fond… Avez-vous vu « Bouil­lon de Cul­ture » ? Une émis­sion cat­a­strophique. Bernard Piv­ot m’a demandé pourquoi je reve­nais sans cesse sur le coup de couteau… mais parce que c’est la seule cer­ti­tude que nous ayons ! Je suis allée en Inde, après la mort de Christo­pher, et les médecins m’ont dit qu’on aurait pu le sauver…

FD :… si le couteau n’avait pas été tourné et retourné dans la plaie.

GW : Et ça, c’est le point cru­cial ! C’est le point déter­mi­nant, et c’est pourquoi ça revient comme leitmotiv.

FD : Je m’attarderai égale­ment sur un texte frag­men­té, et pour­tant d’une vigoureuse cohérence : Le Puri­tain pas­sion­né.

GW : Je vous en prie, Felicita.

FD : Vous affirmez que vous n’avez pas foi en Dieu, mais je lis dans Le Puri­tain pas­sion­né une for­mi­da­ble anamor­phose de la Révéla­tion chré­ti­enne. Votre texte éclaire le mys­tère de l’incarnation en ren­voy­ant l’image inver­sée de la transsub­stan­ti­a­tion : Math­ieu mange le pain, la dent du tigre dévore la chair et Blanche se repaît de l’hostie… Il faut être croy­ant pour trou­ver du goût au sac­rilège ! Seriez-vous une mys­tique athée ?

GW : Non, pas du tout. Les mys­tiques athées sont, par exem­ple, les marx­istes — que je déteste. Le marx­isme est une reli­gion sans Dieu, mais c’est une religion.

FD : Matérialiste.

GW : Un matéri­al­isme per­ver­ti, atten­tion ! Un matéri­al­isme prêt au sac­ri­fice : vivez mal, bouf­fez mal, habillez-vous de chif­fons et vos enfants vivront bien ! Tous les marx­istes que j’ai con­nus étaient des bour­geois et d’affreux puri­tains. Par con­tre, les anar­chistes dont j’ai fait la con­nais­sance apparte­naient à des milieux rad­i­cale­ment opposés : les uns étaient des ouvri­ers non spé­cial­isés, les autres venaient de la très haute société russe. Tous avaient quelque chose en com­mun : une immense générosité de cœur. Une noblesse de cœur que l’on ne trou­ve nulle part ailleurs. Mon mari, Jus­tus Wit­tkop, a écrit sur l’anarchisme. Le véri­ta­ble anar­chisme est basé sur une utopie : l’homme est bon, il est si bon qu’il n’a pas besoin de police, d’armée, etc. Les gens qui y croy­aient jugeaient cela d’après eux-mêmes : ils étaient bons ! Et c’est une erreur… Une erreur que l’on trou­ve déjà chez Mon­taigne quand il affirme : je con­nais les hommes si je me con­nais moi-même. Oh mais non ! Quand on pense que Mon­taigne a écrit ça à l’époque des guer­res de reli­gion alors qu’il a été témoin d’horreurs épou­vanta­bles jusque dans son château !

FD : Faites-vous con­fi­ance à l’humanité ?

GW : Non, absol­u­ment pas. Le singe nu est en train de sci­er la branche sur laque­lle il est assis. Ça ne va pas dur­er longtemps. Moi, je m’en moque. Mais con­tin­uez à faire des enfants ! Vous n’avez pas d’enfant ?

FD : Non, je suis au ser­vice de trois chats.

GW : Ah ! Comme c’est sym­pa­thique ! J’adore les ani­maux. Autant je déteste les enfants et les poupées… Les poupées, je leur crevais les yeux quand j’étais petite et je les piéti­nais. Mais les ani­maux, je les ser­rais sur mon cœur. La sit­u­a­tion est trag­ique quand on con­sid­ère leur exis­tence par rap­port à celle du crim­inel homo sapi­ens. C’est pourquoi je m’abstiens de viande. Mais vous allez frémir quand je vais vous dire que… je suis une fétichiste des fourrures.

FD : Vous n’ignorez pour­tant pas comment…

GW : Oh ! Mais je cul­pa­bilise d’une façon épou­vantable ! Je cul­pa­bilise d’une façon atroce, mais que voulez-vous, le fétichisme implique tou­jours une douleur. Chez moi, c’est la douleur de la culpabilisation.

FD : Vous m’enlevez les mots de la plume lorsque vous écrivez : Pour moi, je ne me suis jamais ressem­blé. Je veux dire que je suis un corps étranger, au vrai sens du mot, au dou­ble, au mul­ti­ple sens du mot. Quelles émo­tions, quels sen­ti­ments, quels songes, enfin, vous ont inspirés ces deux phrases ?

G : Je me suis tou­jours sen­tie dif­férente des autres. Et non seule­ment dif­férente des autres, mais quelques fois dif­férente de moi-même. Comme dit Rim­baud : Je est un autre. C’est une clef qui n’ouvre aucune porte, sauf celle de la mort. Peut-être alors saura-t-on quelque chose, au dernier moment…

FD : Elle est là, la curiosité…

GW : Elle est là, bien sûr ! Sans curiosité, la vie serait inviv­able et même impensable.

FD : Vous écrivez : Jamais la chimère ne nous vient par la porte des lib­ertés. Pou­vez-vous développer ?

GW : La chimère, c’est l’impossible, le fan­tasme, l’imagination. Elle naît de l’interdit moral ou… physique, en ce qui me concerne.

FD : Je vous cite : Toutes les amours — lignes qui fuient, qui fuient — sont par­al­lèles de ne devoir se ren­con­tr­er jamais. J’ai peur de com­pren­dre… voulez-vous m’expliquer ?

GW : Chaque être a cette nos­tal­gie de l’amour partagé en égale mesure, mais ça n’existe pas. Ou alors, il n’y a que Dieu… Ou rien !

FD : Math­ieu étant le per­son­nage inven­té par Denis, le puri­tain pas­sion­né, vous envis­agez la mise en abîme sub­séquente : si Math­ieu — qui ne le peut pas — écrivait à son tour le roman ou le jour­nal d’un homme com­posant lui-même l’histoire d’un autre per­son­nage qui fût l’auteur du héros suiv­ant, il n’y aurait pas de rai­son logique que la chaîne ne s’arrêtât jamais et l’image des miroirs pour­rait se pour­suiv­re alors jusque dans l’infini. Un obsta­cle pour­tant : le tigre.

On pense à Jorge Luis Borges en rai­son de la per­spec­tive nar­ra­tive abyssale comme pour la fas­ci­na­tion exer­cée par le mam­mifère car­nassier. Je ne con­nais que deux auteurs fascinés ain­si par le tigre : vous et Borges[15]. Mais lui n’en a vu qu’au zoo… Je vous cite : La soli­tude a bien des vis­ages. Celle du tigre n’est pas dans sa splen­dide inso­cia­bil­ité, elle ne réside pas dans l’impossibilité de ren­con­tr­er un autre tigre, d’entendre ou de jeter un feule­ment sig­ni­fi­catif. Soli­taire dans la nature, il n’est pas délais­sé. Mais ici, dans cette cel­lule de métal et de béton, aux heures noc­turnes qui sont les heures vitales, seul près des bar­reaux et, pour tout hori­zon, le couloir dal­lé éclairé d’une veilleuse bleue. Aban­don. Ver­lassen­heit, voici le mot… La pitié m’étreint, l’amour me soulève. Être seul, c’est être séparé de soi-même.[16]

GW : Je ne peux pas aller dans un zoo, je ne peux pas voir un tigre enfer­mé. Quand on pense que c’est un nageur qui nage tous les jours, pen­dant des heures… D’ailleurs, l’odeur que le tigre a dans un zoo est tout à fait dif­férente de celle qu’il a dans la nature. Dans la nature, c’est une odeur déli­cieuse… musquée, très musquée.

 

Fran­cis­co Goya, “Le Som­meil de la rai­son…” (1797)

 

FD : La ver­tu n’est-elle rien d’autre qu’une mal­hon­nête com­plai­sance?

GW : Nous ne sommes pas faits pour la vertu.

FD : Mais pensez-vous que l’on puisse être respectueux les uns des autres sans être vertueux ?

GW : Absol­u­ment ! Et c’est là-dessus que se base mon com­porte­ment. On me reproche mon égoïsme puisque je refuse les enfants, mais je trou­ve cet égoïsme infin­i­ment moins vir­u­lent que celui des femmes qui croient avoir tous les droits parce qu’elles ont pis­sé un gosse. Je suis égoïste, certes, mais je respecte l’espace vital et le mode de vie de chacun.

FD : Vous écrivez : La vérité est la part du dis­cours passé sous silence.

GW : C’est une phrase qui a dom­iné toute ma vie et mon com­pagnon­nage avec Jus­tus Wittkop.

FD : Jugez-vous cela regrettable ?

GW : Non, c’est un état de fait.

FD : Dans l’interview que vous avez accordée à Jérôme Garcin[17], vous dites : J’ai vécu pen­dant quar­ante ans avec un homme qui me lais­sait toute ma lib­erté et avec qui j’avais une telle com­plic­ité que l’on pou­vait se racon­ter nos aven­tures respec­tives. Mais il met­tait une seule con­di­tion : que mes pen­chants sadi­ens restent secrets, que rien ne transparaisse de ma nature vir­ile et déca­dente dans notre vie sociale…

GW : Pensez que mon mari était né en 1899 ! Il était très lib­ertin, mais…. Nous allons en com­man­der un autre : c’est peu, un petit verre de vin.

FD : Volontiers.

GW : Jus­tus voulait qu’une cer­taine face soit gardée.

 

Pietro Longhi, “La vendeuse d’essences” détail (1757)

 

FD : Dès les pre­mières pages de Sérénis­sime assas­si­nat[18], vous prévenez le lecteur en ces ter­mes : Le recours à l’économie uni­verselle dans l’espace con­cave, ce temps-espace infran­gi­ble que puérile­ment nous voulons ajuster à nos mesures, ne per­me­t­tant aucun développe­ment et, par ailleurs, toute tra­duc­tion des notions tem­porelles étant vouées à l’échec, il faut bien se résoudre aux arti­fices d’une chronolo­gie n’obéissant qu’à l’imaginaire. Tout rac­cour­ci, toute con­den­sa­tion, ne par­venant à exclure la pul­véri­sa­tion, l’éclatement, on aura con­science de l’infirmité s’attachant aux data­tions. Avant de pour­suiv­re par l’expression de votre idée du des­tin : Une pro­gres­sion toute­fois réside dans le crescen­do vers la cat­a­stro­phe, l’usure de la corde prédes­tinée à rompre; suiv­ie de ces mots qui exau­cent mes prières lit­téraires : Dans le dou­ble régime du réc­it, les scènes ne se recou­vriront pas à la manière d’un palimpses­te mais plutôt comme des dia­pos­i­tives net­te­ment lis­i­bles et jouant à concorder.

Là encore, on pense à Borges, aux mer­veilleuses per­spec­tives ouvertes par les décou­vertes de la théorie quan­tique, aux arcanes fasci­nants de l’ésotérisme gnostique…

GW : Et je ne le savais pas… comme Mon­sieur Jour­dain qui ne savait pas qu’il par­lait en prose !

FD : Exacte­ment ! Moi ça ma…

GW : Touchée.

FD : Profondément.

 

Dehors, il com­mence à pleu­voir. Les para­pluies éclosent rue Delambre.

 

FD : Étant don­né le suc­cès des deux ouvrages que vous avez pub­lié en jan­vi­er, pensez-vous tou­jours que les hommes libres ne font pas car­rière?

GW : Oui… À vrai dire, si le suc­cès était arrivé il y a dix ans, quand j’étais vrai­ment très saine et plus vigoureuse que je ne le suis main­tenant, il aurait été mieux venu. Mais enfin, c’est mieux que rien ! J’espère vivre encore quelques années pour en profiter !

 

L’enregistrement du pre­mier disque numérique est ter­miné ; j’en glisse un sec­ond dans l’appareil, lequel — bleu métallisé — plaît beau­coup à Gabrielle.

 

FD : Qu’est-ce qui vous fascine tant dans le XVIIIe siècle ?

GW : Tout. Le désir de liberté.

FD : Que reprochez-vous à celui qui commence ?

GW : Le con­formisme et le « gâtisme parental », pour repren­dre l’expression de mon ami Niko­la Delescluse. L’autre jour, au super­marché, une vieille femme, une femme de mon âge — mais alors vrai­ment vieille, à tous points de vue — m’a dit : « J’ai tou­jours vécu pour les autres, qu’est-ce que j’ai eu de la vie ? » J’ai été cru­elle, je n’aurais pas dû, mais je lui ai répon­du : « C’est votre faute. »

FD : Vous vivez à Franc­fort depuis de nom­breuses années…

GW : En Alle­magne depuis 1946, à Franc­fort depuis douze ans.

FD : Quels mots choisiriez-vous pour cha­cun de ces lieux ? Nantes, la ville où vous êtes née…

GW : J’ai quit­té Nantes à dix-sept ans et j’y suis retournée il y a une dizaine d’années. Nantes m’évoque le pas­sage Pom­mer­aye, cher à Pieyre de Man­di­ar­gues, un auteur que j’aime énor­mé­ment. C’est une ville intéres­sante où l’on mange très bien.

FD : Paris ?

GW : La rue de Seine, où Jus­tus et moi nous nous sommes cachés pen­dant l’Occupation.

FD : L’Italie ?

GW : Venise, surtout Venise. La pein­ture véni­ti­enne du XVI­I­Ie siè­cle… Pietro Longhi, Francesco Guar­di, Tiepo­lo le Jeune. La musique véni­ti­enne du XVI­I­Ie siècle…

FD (la mine réjouie) : Vitali, Corel­li, Cal­dara, Albi­noni, Torel­li, Vival­di, Cimarosa…

GW : Arcan­ge­lo Corel­li, c’est mon amour.

FD : Je vous remer­cie, Gabrielle.

GW : J’espère ne pas vous avoir déçue, Felicita.

 

Carte de Vœux de Gabrielle Wit­tkop (23/12/01)

 

Nous nous sommes écrit plusieurs fois, mais jamais revues. Je n’ai pas cessé de la lire et chaque nou­velle paru­tion est un cadeau tombé du Ciel (n’en déplaise à Gabrielle).

 

Il y a trois ans, notam­ment, Le Vam­pire Act­if réédi­tait Lita­nies pour une amante funèbre. Pub­lié ini­tiale­ment en 1977 par l’éditeur ital­ien Ceg­na (avec des pho­tos d’Irina Ionesco), ce recueil de trente et un textes poé­tiques a reparu aug­men­té d’une sélec­tion de col­lages inédits de l’auteur (avec une pré­face d’Éric Dussert). Le mer­cre­di 12 juil­let 2017, rue de Char­en­ton, à Paris, la librairie Charybde célébrait l’événement en présence de Karine Cnud­de (Le Vam­pire Act­if édi­tions) et Niko­la Delescluse (ayant droit lit­téraire de Gabrielle Wit­tkop et respon­s­able du blog qui lui est con­sacré). Une soirée aus­si sym­pa­thique qu’instructive à écouter ici.

 

Gabrielle Wit­tkop, “Lita­nies pour une amante funèbre” (Le Vam­pire Act­if, 2017)

 

L’an­née 2020 sera Wit­tkopi­enne ou ne sera pas ! Je vous donne ren­dez-vous en octo­bre à l’occasion de la réédi­tion aux édi­tions Quidam[19] de l’un des plus beaux textes de Gabrielle Wit­tkop : Hem­lock. (Cf. Cen­te­naire de Gabrielle Wit­tkop)

 

Gabrielle Wit­tkop, “Hem­lock” (Quidam, 2020)

 

© Féli­cie Dubois, mars 2020


[1] Chaque jour est un arbre qui tombe, Gabrielle Wit­tkop (Ver­ti­cales, 2006).

[2] Chaque jour est un arbre qui tombe, op. cit.

[3] « Entre­tien avec Gabrielle Wit­tkop par Niko­la Delescluse », 2000.

[4] Tan­dis que Jus­tus réus­sira à s’enfuir à Lon­dres, Gabrielle sera arrêtée par les Nazis et internée à Dran­cy pour avoir caché un déser­teur. À la Libéra­tion, elle sera ton­due par les Français pour avoir aimé un « boche ».

[5] Hem­lock ou les poi­sons, Gabrielle Wit­tkop (Press­es de la Renais­sance, 1988 ; Quidam Édi­teur, 2020).

[6] Le Nécrophile, Gabrielle Wit­tkop (Régine Deforges, 1972 ; La Musar­dine, 1998 ; Ver­ti­cales, 2001).

[7] La Mort de C., Gabrielle Wit­tkop (Chris­t­ian Bour­go­is édi­teur, 1975 ; Ver­ti­cales, 2001).

[8] Sérénis­sime assas­si­nat, Gabrielle Wit­tkop (Ver­ti­cales, 2001 ; « Points » Seuil, 2002).

[9] En 2001, sous l’impulsion de Bernard Wal­let, les édi­tions Ver­ti­cales ont entre­pris d’éditer et/ou rééditer la qua­si- total­ité de l’œuvre de Gabrielle Wit­tkop. Celle-ci était heureuse de voir enfin ses livres regroupés dans une seule mai­son. « Les édi­tions Ver­ti­cales s’honorent d’être aujourd’hui les édi­teurs de cet écrivain sou­veraine­ment dérangeant dont la sin­gu­lar­ité et la beauté de l’écriture ne sont plus à démon­tr­er » pou­vait-on lire dans le dossier de presse. À la suite des trois ouvrages précédem­ment cités, les pub­li­ca­tions con­tin­ueront et ce, bien après le décès de l’auteur : Le Som­meil de la rai­son et La Marchande d’enfants en 2003, Chaque jour est un arbre qui tombe en 2006, Les Rajahs blancs en 2009, Car­nets d’Asie en 2010, Les Départs exem­plaires en 2012 et Usages de faux en 2018.

[10] Unsere Klei­dung, Gabrielle Wit­tkop (Insel Ver­lag, 1985).

[11] E.T.A. Hoff­mann, Gabrielle Wit­tkop (Rowohlt Ver­lag, 1966).

[12] Nous pen­sons ici à Georges Bataille…

[13] Je n’avais pas lu alors Chaque jour est un arbre qui tombe, pub­lié cinq ans plus tard, où Hippolyte/Wittkop écrit dans son jour­nal imag­i­naire, à la date du 27 mai, la phrase pronon­cée par la mère de l’auteur au moment de la présen­ta­tion de l’enfant nou­veau-né : Je ne veux pas la voir, emportez-la. (…) Sa phrase his­torique ira loin. Elle me servi­ra d’horoscope, de pro­gramme, d’itinéraire. Elle sera même en quelque sorte mon via­tique. Mer­ci Madame et mille excus­es pour les bris de clôture.

[14] La Mort de C., op. cit.

[15] À l’issue de l’entretien, Gabrielle me deman­dera d’avoir la gen­til­lesse de bien vouloir lui don­ner les références des textes de Borges dans lesquels il évoque le tigre, ce que je ferai volon­tiers en lui envoy­ant copies des extraits.

[16] Le Puri­tain pas­sion­né, op. cit.

[17] Nou­v­el Obs du 11 jan­vi­er 2001.

[18] Sérénis­sime assas­si­nat, op. cit.

[19] Avec une pré­face de Karine Cnudde.

 

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